Par Vincent Luce, avril 2022

Depuis plusieurs années nous avons sur nos étalages des cosmétiques Kaolin qui viennent de notre canton. Par un beau vendredi de printemps, je me suis rendu à Corsier en vélo pour rendre visite à Anne Couturier qui y a créé la savonnerie Kaolin. Elle m’y a reçu chaleureusement avec son fils, qui ne tardera sans doute pas à lui prêter main forte.

Nous montons à l’étage dans le laboratoire d’où s’échappent de beaux parfums. La pièce est très bien aménagée, de larges étagères en bois accueillent les savons en cours de séchage, les stocks de  matières premières sont soigneusement étiquetés et rangés, les moules prêts à être utilisés et une préparation est en cours avec une recette épinglée au-dessus.

Comment êtes-vous arrivée dans le domaine de la savonnerie ?

J’étais agent de voyage. Je n’avais pas de lien particulier avec ce domaine mais j’étais intéressée par la création de savon et mon activité salariée ne correspondait plus à mes envies. J’ai débuté à travailler sérieusement sur le sujet il y a dix ans et créé Kaolin en 2014. Mon mari a conservé son activité salariée mais est très actif au sein de l’entreprise, il a entre autres réalisé le graphisme des produits.

A l’époque, il n’y avait pas beaucoup d’épicerie de vente en vrac, aussi j’ai débuté par des marchés de Noël puis celui de Plainpalais et de la Fusterie. C’est également toute une organisation d’arriver le matin, d’installer les tables, l’abri, les lumières puis les savons. Actuellement les produits sont vendus dans près d’une vingtaine de points de vente.

De quoi êtes vous la plus fière dans votre activité professionnelle ?

J’ai débuté avec 3 parfums différents de savon. J’en ai aujourd’hui 18. C’est un savoir faire que j’ai construit progressivement qui me permet d’avoir des produits stables qui peuvent être stockés et utilisés plusieurs mois tout en conservant leurs couleurs et leurs parfums. Beaucoup de paramètres sont à prendre en compte lors de la fabrication : la température et l’humidité de l’air ainsi que la nature et la qualité des ingrédients entre autres. Je ne fabrique pas de la même manière un jour de bise ou un jour de pluie.

La gestion des stocks nécessite également de l’attention. Les savons doivent sécher entre un et trois mois avant d’être mis en vente. Je dois donc anticiper les commandes afin d’éviter des ruptures de stock.

Comment êtes-vous venue à l’idée d’un déodorant à la cire d’abeille ?

Le bicarbonate de soude est connu pour ses propriétés désodorisantes. J’ai fait plusieurs essais avec différentes huiles et matières grasses. La cire d’abeille et l’huile de coco m’ont permis d’obtenir un produit stable et efficace. J’ai choisi de ne pas ajouter d’huiles essentielles pour éviter tout risque d’allergie ou d’irritation et pour avoir un produit utilisable par une large partie de la population, homme, femme et adolescents puisqu’il est neutre en terme de parfums. Plusieurs femmes ayant eu un cancer du sein ou sous traitement m’ont dit qu’elles pouvaient l’utiliser car il ne contient évidemment pas d’aluminium, pas de conservateurs et aucun parfums de synthèse.

Le produit peut même être vendu en vrac pour réutiliser la boite en aluminium ou tout autre bocal.

Quelles matières premières utilisez-vous ?

Sachant que plus la composition d’un produit est longue plus celui-ci est douteux, j’ai choisi de réduire mes recettes au minimum.

Nous utilisons principalement de l’huile d’olive, du tournesol et de l’huile de coco.

J’associe autant que possible des plantes de mon jardin, romarin, courge, lavande avec des huiles essentielles en veillant à utiliser juste la quantité nécessaire. J’utilise uniquement des ocres de Roussillon en Provence pour teinter les savons et shampoings.

Quelle préparation est en cours sur votre table ?

C’est une préparation de shampoing aux orties-romarin. J’ai fait une décoction d’ortie. Je la filtrerai, en ajouterai la moitié aux huiles qui sont dans les deux seaux et l’autre moitié à la soude caustique. Il faut faire attention avec la soude car la réaction dégage beaucoup de chaleur. Je chauffe ensuite les huiles légèrement avant de les mélanger avec la soude diluée.

Les deux seaux d’huile et le seau de macération permettent de remplir les trois moules qui me permettront de découper 200 savons.